La récente décision de modifier le calcul du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) à partir de 2026 fait beaucoup parler dans le monde du bâtiment. Alors que certains espèrent des améliorations, la plupart redoutent des effets inattendus sur la rénovation énergétique en France et l’équilibre économique de la filière.
Un nouvel indicateur pour l’électricité
À compter du 1er janvier prochain, le coefficient de conversion de l’électricité entre énergie primaire et énergie finale sera abaissé de 2,3 à 1,9. Concrètement, près de 850 000 habitations pourraient sortir de la catégorie des fameuses « passoires thermiques », sans qu’aucune intervention technique n’ait été nécessaire.
Des inquiétudes pour la rénovation énergétique
Plusieurs acteurs du bâtiment estiment que cette révision pourrait freiner la dynamique de rénovation. Pour la Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (Capeb), la diminution du coefficient d’énergie primaire (CEP) risque d’encourager un basculement massif vers le chauffage électrique, ce qui irait à l’encontre des principes de mixité énergétique.
En outre, cette mesure pourrait priver de nombreux artisans de chantiers, dans un contexte déjà tendu pour le secteur, qui accuse un net ralentissement. En effet, avec ce simple ajustement réglementaire, une bonne partie de leurs potentiels clients ne sont plus dans l’obligation d’engager des travaux de rénovation. Et cela alors que ces entreprises ont développé diverses solutions adaptées aux besoins des bâtiments et aux réalités locales.
Une multiplication des critiques concernant la méthode et la transparence
Au-delà de l’aspect technique, plusieurs professionnels critiquent la manière dont la décision a été prise. L’association Coénove dénonce une « précipitation » et « un déploiement sans véritable concertation ». Le changement apporté au DPE pourrait, selon elle, nuire à la crédibilité d’un outil pourtant essentiel pour guider les politiques publiques de transition énergétique.
Le SYNASAV (Syndicat national de la maintenance et des services en efficacité énergétique) estime pour sa part que « ce changement masque la réalité de la précarité énergétique subie par des centaines de milliers de Français ». À ses yeux, modifier un coefficient ne résout ni les problèmes de consommation, ni les difficultés financières des occupants, ni l’inconfort dont ils souffrent dans des biens mal isolés. Il affirme qu’« il serait plus pertinent de concentrer les efforts sur la rénovation effective des bâtiments plutôt que sur des modifications réglementaires ».
Vers une réduction implicite des aides publiques sans amélioration sur le terrain
Parmi les conséquences évoquées, la question des aides financières retient l’attention. Le syndicat souligne qu’« avec moins de logements étiquetés F ou G sur le DPE, le recours aux dispositifs comme MaPrimeRénov’ baisserait mécaniquement ». Il en résulterait un allègement de la dépense de l’État consacrée à la transition énergétique, sans qu’aucune annonce officielle n’ait été faite à ce sujet.
Un responsable syndical évoque un « verdissement comptable » qui permet des économies pour le Trésor public sans transformer la réalité du parc résidentiel, et sans faire progresser le débat sur un sujet essentiel.